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« Faillites : les banques vont-elles « ponctionner » les indépendants et PME contraints de vendre un bien immobilier ? »

C’est le titre d’un article sur les funding loss publié sur le site de la RTBF ce 17 février 2021.

Il s’agit de la retranscription (complétée de certains passages) d’une interview diffusée sur la première (disponible sur le site de la RTBF également).

L’article met tout d’abord en exergue l’aspect dissuasif des indemnités réclamées par les banques à l’occasion du remboursement anticipé d’un crédit professionnel, et stigmatise la situation de blocage dans laquelle peut se trouver le crédité contraint de vendre l’immeuble financé par le crédit.

Jusque là, d’accord.

Mais l’article laisse ensuite à penser que les tribunaux n’offrent pas de solution à cette problématique.

Cela ressort notamment des extraits suivants :

Là, pas d’accord.

Il est erroné d’écrire que les arrêts prononcés par la Cour de cassation en 2020 « ne permettent plus – en tout cas pas avec de bonnes chances de succès – de contester des funding loss ».

J’ai déjà consacré deux articles à l’enseignement qui se dégage de ces deux arrêts (articles disponibles en cliquant ici pour l’arrêt du 27 avril 2020 et ici pour l’arrêt du 18 juin 2020). 

La légalité d’une indemnité de remboursement anticipé réclamée par une banque dépend des caractéristiques du contrat de crédit en question.

Enoncer qu’il n’est plus possible de contester ces indemnités avec de bonnes chances de succès, ou au contraire (comme le font d’autres avocats) prétendre que toutes ces indemnités sont automatiquement contestables n’est pas sérieux.

Seul un examen du contrat en question et de la volonté commune des parties lors de sa conclusion permet de déterminer si la limite de 6 mois d’intérêts doit ou non s’appliquer.

C’était déjà la cas avant les arrêts de 2020 de la Cour de cassation, et c’est toujours le cas après ces arrêts.

Plusieurs décisions de justice ont d’ailleurs déjà été rendues (après les arrêts de 2020 de la Cour de cassation) qui le confirment fort clairement.

Contrairement à ce que laisse entendre l’article publié sur le site de la RTBF, dans de très nombreux cas, les PME et les indépendants disposent bel et bien d’un recours en justice pour faire valoir la limitation de 6 mois d’intérêts de l’article 1907bis du Code civil.

Ils ne sont pas soumis au bon vouloir de leur banque à l’égard de ces indemnités de remploi disproportionnées.

L’abus de droit, présenté comme une bouée de sauvetage dans l’article, est loin d’être le seul argument dont ils disposent.

Laurent Frankignoul, avocat.

Le 18 février 2021

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